Le Génocide
Ignoré des Chrétiens au Nigeria
Par Raymond Ibrahim
1er septembre 2020
Traduction du texte
original : The Ignored Genocide
of Christians in Nigeria.
https://fr.gatestoneinstitute.org/16442/genocide-chretiens-nigeria
Au début de l'année... [Boko Haram] a publié la
vidéo d'un enfant musulman masqué braquant un pistolet dans le dos d'un
chrétien ligoté et agenouillé. L'otage âgé de 22 ans, étudiant en biologie,
avait été enlevé sur le chemin de son université. Après avoir chanté en arabe
et s'être lancé dans une diatribe antichrétienne, l'enfant musulman a tiré
plusieurs balles dans la nuque du chrétien.
Certes, les médias dits traditionnels rendent
compte des incidents les plus macabres ... mais l'essentiel de la persécution
est passé sous silence. Les journalistes craindraient-ils qu'au lieu de simples
« crimes », apparaisse soudain un schéma politiquement incorrect d'attaques
motivées idéologiquement ?
La raison pour laquelle de simples bergers Peuls
ont, depuis 2015, réussi à tuer près de deux fois plus de chrétiens que les
terroristes « professionnels » de Boko Haram.... pourrait
s'expliquer - pour citer l'évêque nigérian Matthew Ishaya
Audu - « par le fait que le président Buhari est également un Peul ».
« Puisque le gouvernement et ses alliés politiques
affirment que les meurtres n'ont aucune connotation religieuse, pourquoi les
terroristes et les bergers ciblent-ils uniquement les communautés et les
dirigeants chrétiens ? » - L'Association chrétienne du Nigeria, Centre
international pour le reportage d'investigation, 21 janvier 2020.
Le massacre massif des chrétiens du
Nigeria – que certains observateurs internationaux qualifient de génocide -, a
atteint des niveaux record.
Photo : La ville d'Auno, au Nigeria, le 10 février 2020, au lendemain d'une
attaque djihadiste qui a fait 30 morts. Plusieurs femmes et enfants ont
également été kidnappés.
(Photo par Audu
Marte/AFP via Getty Images)
Au Nigeria, les massacres massifs de chrétiens, -
que certains observateurs internationaux ont
qualifié de génocide – ont battu de nouveaux records.
A en croire divers articles de presse parus
le 4 août, 171 chrétiens au moins ont été massacrés par des bergers Peuls
musulmans au cours des trois dernières semaines :
« Et ces chiffres n'ont rien d'exhaustif. Le bilan
est susceptible d'être beaucoup plus élevé. La violence a également chassé
plusieurs milliers de personnes loin de leurs maisons les privant ainsi de tout
moyen de subsistance ; une crise aggravée par le confinement dû au Covid ... Notre bureau de presse est submergé d'histoires
semblables à celles-ci depuis de nombreux mois. Mais ce bilan implacable et
sanglant que nous faisons de la vie chrétienne est étrangement absent des
médias grand public. Ce qui ne laisse pas d'inquiéter. »
Le 10 juillet, des bergers musulmans ont lancé un
raid contre une communauté agricole massacrant 22 chrétiens — « principalement des femmes et
des enfants » — et brûlant de nombreuses maisons. « Les Peuls sont entrés en
tirant » se souvient Bilkisu James depuis son lit d'hôpital. « Ils ont tué deux
de mes enfants [et mon mari]. » Ils ont également « tailladé à mort cinq autres
membres de la famille de Bilkisu avec des machettes,
dont une mère et son bébé fille, ainsi qu'une mère et ses deux fils ».
Un voisin musulman semble avoir dénoncé cette
famille chrétienne aux agresseurs surgis de l'extérieur : « Avant d'être
abattue » a poursuivi Bilkisu, « le Peul qui est mon voisin, je l'ai vu, il m'a
dénoncé. Je l'ai suppliée à genoux de n'en rien faire ». Mais en vain. Les
bergers ont tiré dans la poitrine et le dos de Bilkisu
et l'ont laissée pour morte. Elle « les a entendu allumer les
allumettes et mettre le feu à la maison ».
Le lendemain, un village voisin a été attaqué : « dix
femmes, un bébé et un homme très âgé ont brûlé vifs dans l'incendie de la
maison où ils s'étaient réfugiés. Sept autres villageois ont été blessés et
quatre autres maisons ont été incendiées. Le 19 juillet, 32 chrétiens ont été massacrés
au cours d'attaques de bergers Peuls.
Le 23 juillet, « sept chrétiens ont été tués au
cours d'une horrible attaque
qui a eu lieu un soir de pluies torrentielles,... des miliciens ont taillé en
pièces, à coups de machette, des hommes, des femmes et des enfants désarmés ».
Le 20 juillet, une première attaque contre ce même village avait
entraîné la mort par assassinat de sept personnes.
Le 29 juillet, des bergers musulmans ont assassiné 14 autres chrétiens, dont
13 appartenaient à la même famille. Un seul a survécu ; sa femme, tous ses
enfants, tantes, oncles, frères... ont été massacrés.
La semaine dernière, des djihadistes ont pris
d'assaut l'église du Lion de Juda à Azikoro et
ont ouvert le feu sur
les fidèles ; quatre chrétiens ont été tués.
Lister les atrocités au sein d'un seul article — il
s'en produit des centaines chaque année — est parfaitement futile. (Qui
souhaite avoir une vue exhaustive des souffrances chrétiennes au Nigeria et
dans d'autres nations musulmanes, peut
consulter le rapport mensuel « Persecution des Chrétiens » de Gatestone.
Mais sur le seul mois d'avril 2020, des bergers
musulmans armés de machettes ont assassiné 13 chrétiens dans
la nuit du 1er au 2 avril. « Nous nous sommes réveillés pour enterrer sept
personnes brûlées à mort ...», a déclaré une
source. Les personnes assassinées « étaient pour la plupart des chrétiens âgés
qui n'ont pas été assez rapides pour se perdre rapidement dans les broussailles
environnantes comme les autres membres de la communauté ».
Le 7 avril, les bergers Peuls ont massacré le
pasteur, Matthew Tagwai et trois membres de sa
congrégation, dont un garçon de 10 ans. La veuve enceinte de Matthew Tagwai et ses deux petits enfants porteront son deuil.
Le 10 avril, des bergers Peuls musulmans ont assassiné le
pasteur Stephen Akpor, 55 ans. « Deux bergers sont arrivés
à l'Église Céleste... ils lui ont tiré dessus alors qu'il priait et conseillait
cinq fidèles dans l'église », ont déclaré ses
collègues. « Les bergers ont tiré plusieurs fois sur le pasteur, puis l'ont
poignardé à mort. » Sa femme et ses cinq enfants portent désormais son deuil.
Le 11 avril, des bergers Peuls musulmans ont abattu un
fermier chrétien.
Le 13 avril, des bergers Peuls musulmans ont décapité deux chrétiens d'une
si horrible manière qu'ils ont dû être « enterrés sans leur tête ».
Le 14 avril, des bergers Peuls musulmans ont massacré neuf chrétiens dont
six enfants et une femme enceinte. « Ils étaient armés de machettes et de
fusils AK-47 », se souvient un
survivant : « Ils ont attaqué notre village vers 20 heures ; ils criaient : « Allahu Akbar ! » en mitraillant nos habitations. » Trente-trois
maisons ont été incendiées.
Le 16 avril, des bergers Peuls musulmans ont tué Sebastine Stephen, un jeune étudiant chrétien. « Les
bergers Peuls qui disposaient d'armes sophistiquées étaient plus de 50. Ils
tiraient sporadiquement. Un survivant a rapporté qu'après
avoir tué le jeune homme, ils sont entrés par effraction dans la maison de M.
Jack Nweke et l'ont enlevé lui et sa femme,
abandonnant derrière eux leurs trois enfants.
Le 19 avril, des bergers Peuls musulmans ont tué quatre chrétiens. «
Trente-huit maisons ont également été rasées, et 87 familles se sont retrouvées
sans abri », a indiqué une
source.
Le 20 avril, « un fermier
chrétien, Titus Nyitar, a été abattu et sa tête a été
coupée », a déclaré un voisin. Titus « travaillait dans sa ferme lorsqu'il a
été tué par les bergers ». Ensuite, ils « ont gagné le village pour incendier
des maisons. Ils ont enlevé trois villageois ».
Le 22 avril, des bergers Peuls musulmans ont tué 12 chrétiens ;
au cours de la même attaque, ils ont pénétré dans l'église et enlevé un couple
qui célébrait son mariage.
Le 23 avril, les Peuls «
ont mené diverses attaques contre des zones à prédominance chrétienne au
centre-nord du Nigeria. Ils ont tué deux personnes, kidnappé une autre et
incendié un bâtiment d'église qui comprenait la maison du pasteur ».
Hormis les crimes les plus horribles - comme
le viol et le massacre d'une étudiante
chrétienne s'abritant dans une église - les grands médias
traditionnels passent sous silence l'essentiel de ces persécution. Comme si les
journalistes craignaient qu'au lieu de simples « « crimes », apparaisse soudain
un schéma politiquement incorrect d'attaques motivées idéologiquement.
« C'est comme si la vie des Chrétiens n'avait plus
d'importance », a déclaré un pasteur
nigérian à propos de l'attaque d'un mariage qui a fait 32 morts.
« Il est très troublant que ces assauts quotidiens
contre les chrétiens ... se poursuivent indéfiniment dans l'indifférence des
autorités fédérales et régionales ... il n'y a pas de visites de sympathie aux
survivants ... aucun matériel de secours n'est mobilisé pour alléger les
souffrances des milliers de personnes déplacées à l'intérieur du pays. »
« Je suis aujourd'hui convaincu » a déclaré le
survivant d'une attaque Peul qui a coûté la vie à sa sœur et à quatre autres
chrétiens, « que certains musulmans des services de sécurité sont de connivence
avec ces hommes armés qui attaquent notre peuple ... la triste réalité est que
notre peuple a multiplié les démarches auprès du gouvernement au niveau
national et fédéral sans que rien ne bouge. »
« Quel crime ces innocents agriculteurs ont-ils
commis contre les bergers Peuls » a demandé le
survivant de l'attaque qui a tué un pasteur et un enfant de 10 ans ?
« Combien de temps encore allons-nous subir ces
meurtres en série ? Allons-nous supplier à l'infini le gouvernement et les
agences de sécurité de venir en aide à notre peuple ? »
De récentes statistiques éclairent
toutes ces questions d'une lumière nouvelle : depuis 2009, « pas moins de 32
000 chrétiens ont été massacrés par les djihadistes du pays » - sans que rien
soit jamais fait pour les en empêcher. The Nigerian
Voice de mai indique :
« Les miliciens Peuls et Boko Haram ... ont intensifié
leurs violences anti-chrétiennes ... au cours des quatre derniers mois et demi
de 2020, pas moins de 620 chrétiens sans défense ont été assassinés [470 par
des bergers Peuls et 150 par Boko Haram], sans oublier l'incendie ou la
destruction aveugles de leurs lieux de culte et d'enseignement. Les atrocités
commises contre les chrétiens ont été rendues invisibles car les forces de
sécurité et les acteurs politiques ont détourné le regard quand ils n'étaient
pas en collusion directe avec les djihadistes. C'est par centaines que les
maisons ont été incendiées ou détruites au cours de cette période, sans oublier
les dizaines de lieux de culte et d'enseignement chrétiens. »
L'évêque nigérian Matthew Ishaya
Audu pense que si de simples
bergers Peuls ont, depuis 2015, réussi à tuer deux fois plus de chrétiens que
les « professionnels » du terrorisme Boko Haram, c'est « parce que le président
Buhari appartient également au groupe ethnique
Peul. De nombreux dirigeants
chrétiens du Nigéria en sont également convaincus. »
En janvier, l'Association chrétienne du Nigéria,
qui fédère de nombreuses associations, a rendu public un communiqué qui
accuse « le gouvernement fédéral du président Muhammadu
Buhari » de « collusion » avec les terroristes
islamiques « pour exterminer les chrétiens au Nigéria ». L'Association a posé
la question suivante :
« Puisque le gouvernement et ses alliés politiques
affirment que les meurtres n'ont aucune connotation religieuse, pourquoi les
terroristes et les bergers Peuls ciblent-ils uniquement les communautés et les
dirigeants chrétiens ? »
Certains dirigeants nigérians vont plus loin que Buhari et mettent en cause « le mal appelé Barack Obama » -
selon les mots de Femi Fani-Kayode, ancienne
ministre nigériane de la Culture et du Tourisme. Le 12 février, cette
ex-responsable politique a posté sur Facebook :
« En finançant et en soutenant [l'actuel président
du Nigeria Muhammadu] Buhari
à l'élection présidentielle de 2015 et en aidant Boko Haram en 2014/2015,
Obama, John Kerry et Hilary Clinton ont commis envers le Nigeria des actes de
pure méchanceté et leurs mains dégoulinent du sang de toutes les personnes
tuées par l'administration Buhari, ses bergers Peuls
et Boko Haram au cours des cinq dernières années. »
Bien que les compatriotes Peuls du président Buhari aient revendiqué la part du lion des attaques contre
les chrétiens depuis sa présidence, Boko Haram - le fléau originel des
chrétiens au Nigéria – est loin de demeurer inactif. Au début de l'année...
Boko Haram a publié la vidéo d'un enfant musulman masqué braquant un pistolet
dans le dos d'un otage chrétien ligoté et agenouillé. Il s'agissait d'un
étudiant en biologie de 22 ans enlevé sur le chemin de son université. Après avoir
chanté en arabe et s'être lancé dans une diatribe antichrétienne, l'enfant
musulman a tiré plusieurs balles dans la nuque du prisonnier.
Il y a quelques semaines, des islamistes armés ont
enlevé le révérend Layan Andimi,
pasteur et président de district de l'Église des Frères du Nigeria. Son église
et sa famille étant dans l'incapacité de réunir l'exorbitante rançon exigée par
les ravisseurs - deux millions d'euros –, les islamistes ont décapité cet
homme marié et père de neuf enfants. Le 5 janvier, dans une vidéo publiée par
ses ravisseurs, le pasteur Lawan déclarait qu'il
espérait revoir sa femme et ses enfants ; cependant, « si les conditions ne
sont pas réunies, c'est que telle est la volonté de Dieu. Je veux que tous, les
proches, moins proches et chers collègues, soyez patients. Ne pleurez pas, ne
vous inquiétez pas, et remerciez Dieu en tout ».
Au début de cette année, peu après la décapitation
de 10 autres chrétiens, Mgr Matthew Hassan Kukah,
évêque, a déclaré que le
gouvernement nigérian « utilise les leviers du pouvoir pour assurer la
suprématie de l'Islam. La seule différence entre le gouvernement et Boko Haram,
c'est que Boko Haram utilise aussi la bombe.
Raymond Ibrahim,
auteur du livre Sword and Scimitar: Fourteen centuries of war
between Islam and the West (Le
Sabre et le Cimeterre, Quatorze siècles de guerre entre l'islam et
l'Occident), est Distinguished Senior Fellow du Gatestone Institute, Shillman Fellow au David Horowitz
Freedom Center et Fellow Judith Rosen
Friedman au Middle East Forum.
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