Zineb El Rhazoui
Il faut détruire le fascisme islamique
Zineb : la femme la plus menacée de France
Pour Zineb El Rhazoui
Par
Aurélien Marq - 25
décembre 2018
https://www.causeur.fr/islam-zineb-rhazoui-charlie-daech-157433
Zineb El Rhazoui. Sipa. Numéro de reportage : AP22037111_00000
« Il faut que l’islam se soumette à la critique, qu’il se soumette à l’humour,
qu’il se soumette aux lois de la République, qu’il se soumette au droit
français. On ne peut pas venir à bout de cette idéologie (l’islamisme) en disant
aux gens : l’islam est une religion de paix et d’amour et c’est juste le
terrorisme qui est mal. »
Paroles de bon sens, prononcées sur CNews le 14 décembre après l’attentat
islamiste de Strasbourg, qui devraient être reprises sans hésitation par tous
ceux qui prétendent se soucier de l’avenir de notre société. Mais qui valent
depuis à Zineb El Rhazoui un déchaînement de haine : injures bien sûr, mais
surtout appels au meurtre, appels au viol…. Ce qui, évidemment, ne fait que
confirmer la pertinence de ses propos.
D’autres prendraient peur et s’inclineraient. Pas elle. Heureusement pour nous
tous, heureusement pour la France, loin de plier l’ancienne journaliste de Charlie
hebdo contre-attaque – espérons que la justice se montrera à la
hauteur des enjeux – et
réaffirme clairement ses convictions le
19 décembre sur la même chaîne : « L’islam
doit se soumettre aux lois de la République, à l’humour, à la raison, à la
critique, comme toutes les autres idéologies, comme toutes les autres religions,
comme toutes les autres sectes. »
Elle mérite notre gratitude et notre admiration, et comme toute l’équipe de Causeur,
je la soutiens sans réserve.
« Je suis mortifiée de voir que la France, avec son histoire, n’a pas identifié
la bête immonde qui est face à nous. » a
dit aussi Zineb. « Moi,
j’ai grandi là où elle a grandi, je parle la même langue qu’elle. Le sang de mes
amis de Charlie Hebdo a coulé et je ne veux pas qu’il ait coulé pour rien. Je
tiens le coup en me disant : quel pays laissons-nous à nos enfants ? » (Nice-Matin,
le 21 décembre 2018).
Zineb El Rhazoui est née au sud de la Méditerranée, et son nom en porte l’écho.
Mais faut-il le préciser, c’est un honneur et une fierté pour la France qu’une
telle femme ait choisi sa terre, sa langue et son peuple pour les faire siens.
Même si elle avait tort, il serait primordial qu’elle ait le droit de s’exprimer
sans être confrontée à des menaces barbares. Ceux qui tentent de la faire taire
ne menacent pas qu’elle, ils menacent le débat, la confrontation des idées, la
rencontre entre la pensée de chacun et celle d’autrui, l’exercice de la raison
et l’épanouissement de l’intelligence. Au passage, il est révélateur de
constater qui de nos jours préfère l’intimidation, les invectives et la censure
aux arguments et aux analyses. Ce n’est le fait que d’une seule religion et de
certaines théories sociologiques ou politiques, qui singent la science et
feignent la vertu mais dont la validité est inversement proportionnelle à
l’arrogance. Et qui gagneraient à comprendre – mais en sont-elles capables ? –
que cette arrogance leur vaut bien plus d’hostilité que n’importe laquelle des
critiques qu’elles rejettent….
Et il se trouve que Zineb El Rhazoui a raison. Aucune croyance, aucune doctrine,
aucune religion n’est ni n’a le droit de se prétendre au-dessus de la critique.
Et cela, nous devons tous le dire et le défendre, quelles que soient nos
sympathies politiques ou philosophiques, notre milieu social ou professionnel,
nos origines géographiques ou ethniques, notre sexe ou notre genre, notre foi ou
notre absence de foi. La lucidité sur l’essentiel et le courage face à
l’abjection dépassent largement ces critères.
Je nuancerai ou plutôt préciserai les propos de Zineb sur un point seulement, en
distinguant « religion » de « secte », ce dernier terme pris dans son sens
résolument négatif.
La critique, à la fois éthique, rationnelle et intuitive, et même esthétique,
est indispensable à toute religion. Elle n’oblige pas à l’insatisfaction
permanente et stérile, ni à refuser de s’appuyer sur quelques fondations que ce
soit. Mais elle permet à une religion – comme d’ailleurs à n’importe quelle
doctrine politique, économique, scientifique – de se souvenir qu’elle n’est
qu’une tentative de comprendre, de décrire, d’évoquer, de donner à ressentir la
réalité du monde, un moyen de tisser une relation avec le Cosmos, immanent et
transcendant, mais qu’elle n’est pas le monde. Une religion est au mieux un
chemin vers Dieu, mais ne doit pas être elle-même divinisée. La critique
l’oblige à relancer sans cesse ses efforts pour s’élever vers le Divin et pour
creuser en elle-même afin de l’accueillir dans son mystère, au lieu de se mettre
à idolâtrer l’image qu’elle s’en fait, voire de s’idolâtrer elle-même.
L’acceptation de la critique est donc justement ce qui distingue une véritable
religion d’une secte.
La République laïque garantit la liberté de religion. Mais la République a aussi
l’obligation de combattre les sectes qui voudraient étouffer la liberté de
pensée, de conscience et d’expression, qui voudraient priver ses citoyens de
l’autonomie et de la responsabilité qui doivent être les leurs. Si l’islam veut
être accepté et respecté comme une religion, qu’il cesse enfin de se comporter
comme une secte !
Et il serait grand temps. Peut-être sera-t-il un jour une « religion de paix et
d’amour » ou plutôt, peut-être une religion de paix et d’amour naîtra-t-elle un
jour des efforts de certains musulmans pour arracher leur tradition à ce qu’il y
a de malsain dans ses fondations. Assurément, certains s’y emploient : jadis
Abdelwahab Meddeb, aujourd’hui Ghaleb Bencheikh, Abdennour Bidar et d’autres.
Peut-être réussiront-ils un jour, mais c’est loin d’être fait.
Aucun musulman ne peut se dire véritablement républicain, ni humaniste, ni même
sincèrement soucieux de morale, s’il ne prend pas ses distances avec le Coran.
Car les crimes commis au nom de l’islam, en Alsace comme en Syrie comme partout
ailleurs, le sont certes au mépris des convictions intimes d’un certain nombre
de ses fidèles, mais en parfaite conformité avec sa doctrine et ses textes
sacrés. D’après la tradition musulmane, le prophète et ses compagnons eux-mêmes
n’ont pas hésité à imposer leur religion par la violence, et dans le monde
musulman la criminalisation de l’apostasie n’est pas l’exception mais la norme,
déni inhumain et impie de la liberté de conscience. Inhumain car il vise à
amputer l’Homme d’une part fondatrice de son humanité, impie car sans cette
liberté il ne peut y avoir de foi authentique.
Quoi
qu’ils prétendent, ceux qui voudraient faire taire Zineb travaillent à étouffer
toute critique de l’islam, ce qui signifie qu’ils cautionnent chaque aspect de
celui-ci. Ils sont donc complices de ce
qu’il y a de pire dans ses enseignements, et de ce qui est fait de pire en
conformité avec ceux-ci.
Complices de la condamnation à mort pour blasphème de Qaiser
et Amoon Ayub, comme hier d’Asia Bibi. Complices de chaque coup de
fouet infligé à Raif Badawi. Complices de l’appel au jihad guerrier conquérant
qui imprègne le Coran :
«
Et combattez-les jusqu’à ce qu’il ne subsiste plus d’association
(polythéisme, y compris le christianisme trinitaire), et que la religion
soit entièrement à Allah. » Sourate 8 verset 39.
« L’association (d’une autre divinité au seul Allah) est plus grave que
le meurtre. » Sourate 2, verset 191.
« Ô vous qui croyez ! Ceux qui associent d’autres divinités au Seul Allah,
ne sont qu’impureté. (…) Combattez ceux qui ne croient ni en Allah ni au
Jour dernier, qui n’interdisent pas ce qu’Allah et Son messager ont interdit
et qui ne professent pas la religion de la vérité, parmi ceux qui ont reçu
le Livre, jusqu’à ce qu’ils versent la capitation par leurs propres mains,
après s’être humiliés. Les Juifs disent « Uzayr est fils d’Allah » et les
Chrétiens disent « le Christ est fils d’Allah ». Telle est leur parole
provenant de leurs bouches. Ils imitent le dire des mécréants avant eux.
Qu’Allah les anéantisse ! » Sourate 9 versets 28, 29 et 30.
Traductions diffusées sur oumma.com.
Complices des crimes de Cherif Chekatt et de ses
pareils, complices de la destruction de Palmyre et des Bouddhas de Bâmiyân comme
jadis du sanctuaire de Taëf. Complices du viol des captives de guerre vendues
comme esclaves par l’État Islamique. « Vous
sont interdites (…) les femmes qui ont un mari, sauf celles qui sont vos
esclaves en toute propriété. »Sourate 4, versets 23 et 24,
légitimation sans ambiguïté de l’esclavage sexuel.
Complices, tous, y compris ceux qui n’agissent pas au nom de l’islam mais d’une prétendue tolérance qui n’est que lâcheté, ou absence totale de sens moral. En voulant réduire au silence les critiques et les réformateurs de l’islam, sous prétexte souvent de « ne pas stigmatiser », « ne pas faire le jeu de », ils laissent le champ libre aux intégristes. N’est-ce pas, Taha Bouhafs de la France Insoumise, formation politique toujours aussi ambiguë ? N’est-ce pas, la CRI ?
N’est-ce pas, les décoloniaux qui reprochez à Zineb de parler « comme les
Blancs » ? N’est-ce pas, les féministes de pacotille qui poussent des cris
d’orfraie en voyant des fesses sur une publicité de lingerie, mais se taisent
devant des appels au viol ?
Au sens le plus noble, une religion est une traduction
culturelle de l’élan à la fois naturel et inspiré de l’Homme vers les Dieux.
Mais certaines doctrines que l’on appelle couramment « religions » sont bien
éloignées de cet élan. Seule une critique d’une impitoyable rigueur est en
mesure de distinguer et séparer ce qui en elles relève véritablement du
religieux, et peut donc avoir sa place dans la République, de ce qui doit en
être expulsé car n’étant que secte, fanatisme, obscurantisme, « superstition »
au sens que donnait à ce mot le prêtre d’un dieu qui « confie
à la sagacité de notre esprit les discussions philosophiques, en nous inspirant
un grand désir de connaître la vérité, (…) qui lui-même n’est pas moins
philosophe que prophète, (et sait bien) qu’il convient à la philosophie de
questionner et de faire des recherches, d’admirer et de douter. »
(Plutarque, Sur
l’ε de Delphes).
Les religions ne méritent d’être considérées comme
telles et d’avoir droit de cité que si, et seulement si, elles rejettent et
condamnent toute soumission aveugle à une puissance arbitraire, et donnent la
primauté à l’exigence éthique qui fait la noblesse de l’Homme – mais aussi la
noblesse de toute divinité digne de ce nom, dont la vénération grandit plutôt
qu’elle n’écrase. « Car
les Dieux se doivent d’être plus sages que les mortels. » (Euripide, Hippolyte).
Vous tous les islamistes, et vous tous qui les protégez,
qui appelez à tolérer que l’on inspire, encourage ou justifie les plus abjectes
monstruosités sous prétexte que leurs auteurs disent les perpétrer au nom d’un
dieu, l’horreur de ce que que vous défendez vous rattrapera tôt ou tard.
C’est à vous, à tous les fanatiques, et à toutes vos
idoles gorgées de sang que s’adressent ces paroles à travers les millénaires : « Hors
d’ici ! Sortez de ce temple ! Il ne vous convient pas d’approcher de cette
demeure, mais il vous faut aller là où l’on coupe les têtes, où l’on crève les
yeux, où sont les tortures, les supplices, où les lapidés et les empalés
gémissent ! C’est là que vos faces effroyables seront les bienvenues, vous qui
écoutez ces cris comme s’ils étaient des chants joyeux et qui en faites vos
délices ! Les Dieux crachent de dégoût sur votre passage. » (Eschyle, Les
Bienveillantes.)
J’ai commencé à écrire ces lignes le jour depuis
longtemps symbolique du solstice d’hiver. Nos rues et nos demeures sont parées
de leurs plus beaux atours pour la fête traditionnelle et chrétienne de Noël. En
cette période entre toutes, ne négligeons pas les lumières qui brillent dans les
ténèbres. S’il est des Nuits fécondes, il est aussi des obscurités qui
voudraient tout engloutir, mais Zineb El Rhazoui est l’une de ces lumières qui
ne renoncent pas, au péril de sa vie et elle le sait. Elle est une de celles
auxquelles nos enfants devront, j’espère, de continuer à vivre dans une société
qui reconnaît la dignité intrinsèque de chacun et de chacune, et la liberté qui
est à la fois conséquence et fondation de cette dignité. Une société qui malgré
ses erreurs et ses échecs continue à aspirer à l’idéal qu’essaye d’incarner la
République, et auquel une femme prête ses traits, sa droiture, son courage. Pour
tout cela, Zineb est Marianne.
Le JT
Laurent Bouvet : ce que révèle l'affaire Zineb El Rhazoui
·
Par Paul
Sugy
·
Publié le 24/12/2018 à 10:16
FIGAROVOX/ENTRETIEN - Suite à des propos qu'elle a tenus sur l'islam, l'ancienne
journaliste de Charlie Hebdo, Zineb el Rhazoui, est la cible d'insultes et de
menaces de mort sur les réseaux sociaux. « Si elle avait été menacée pour avoir
critiqué le judaïsme ou le christianisme, elle aurait été immédiatement
défendue, à juste titre, par ceux qui se taisent aujourd'hui ! », constate
Laurent Bouvet.
Laurent Bouvet est professeur de Science politique à l'Université de
Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines. Il a publié L'Insécurité culturelle chez
Fayard en 2015.
La journaliste Zineb el Rhazoui a dit sur CNews que l'islam devait « se
soumettre à la critique ». Ces propos lui valent un déferlement de haine sur les
réseaux sociaux. Signe qu'en France, le débat sur l'islam n'est toujours pas
apaisé ?
Le débat est en effet loin d'être apaisé. Pour plusieurs raisons qu'on voit se
combiner une fois de plus à l'occasion des déclarations pourtant très anodines
de Zineb El Rhazoui, à savoir que l'islam doit comme chaque culte se conformer
aux lois de la République et qu'il est donc possible, dans un pays sécularisé et
laïque, de critiquer comme on l'entend n'importe quelle croyance comme n'importe
quelle idée.
La première raison, c'est l'intolérance religieuse radicale de certains milieux
musulmans qui ne supportent aucune critique de leur culte. Ils n'acceptent pas
la sécularisation de la société et la laïcité comme principe régulateur. Ils
sont incapables de penser leur foi dans un monde où elle ne produit pas de loi.
Les enquêtes dont on dispose (on peut penser notamment à celle de l'Institut
Montaigne) montrent qu'une partie non négligeable des musulmans vivant
aujourd'hui en France n'acceptent pas de placer la loi de la République avant la
loi de dieu. C'est un problème majeur pour notre société car il est évidemment
hors de question de céder le moindre pouce de terrain à ce genre de
considérations.
La deuxième raison, c'est le combat que mènent les islamistes de toutes sortes
contre tous ceux, originaires de pays où l'islam est la religion majoritaire
notamment, qui refusent de se plier à leur vision du monde, au-delà du dogme
religieux lui-même. C'est le terreau sur lequel ont fleuri les terroristes
islamistes ces dernières années. Et dans le cas de Zineb El Rhazoui, c'est
particulièrement clair : ancienne de Charlie Hebdo, en lutte depuis des années
contre l'islamisme, elle est une cible de choix.
Zineb El Rhazoui aurait été menacée pour avoir critiqué le judaïsme ou le
christianisme, elle aurait été immédiatement défendue, à juste titre, par ceux
qui se taisent aujourd'hui !
La troisième raison, c'est la complaisance de toute une partie du système
médiatique, universitaire ou politique (on le voit clairement au sein d'une
partie de la gauche notamment) vis-à-vis de ce genre de discours intolérants et
militants. L'islam est considéré comme une religion de « dominés », en raison de
la colonisation et de l'immigration notamment, ce qui lui conférerait un statut
particulier l'exonérant des conséquences de la sécularisation et de la laïcité.
On peut constater désormais quasi-quotidiennement le deux-poids deux-mesures qui
s'applique en la matière. Ainsi par exemple, Zineb El Rhazoui aurait été menacée
pour avoir critiqué le judaïsme ou le christianisme, elle aurait été
immédiatement défendue, à juste titre, par ceux qui se taisent aujourd'hui parce
qu'il s'agit de l'islam - voir qui l'accusent d'être « islamophobe »! Cette
place à part réservée à l'islam conduit à assigner ainsi en permanence aux
musulmans, de manière collective et essentialisée, un rôle de victimes est une
forme de paternalisme qui n'a rien à envier à celui du colonialisme.
Certains islamistes semblent ne pas supporter le « blasphème ». Mais ici, il ne
s'agit même pas de cela, seulement d'une critique : comment expliquer une telle
intolérance religieuse ?
Cette intolérance s'explique d'abord et avant tout comme on l'a dit par un
problème interne à l'islam : la difficulté fondamentale de cette religion, aux
yeux d'une partie de ses croyants au moins, de se fondre dans des sociétés
sécularisées et laïcisées, et de là d'accepter, par exemple, la logique de
droits de l'Homme détachés de la religion ou encore une égalité des droits entre
hommes et femmes. Blasphème, apostasie, adultère, homosexualité… restent aux
yeux de tout un ensemble de musulmans des crimes impardonnables.
Dès lors, il est difficile sinon impossible de « vivre ensemble » comme on le
dit aujourd'hui car de telles exigences sont incompatibles avec notre droit et,
au-delà, avec notre conception de la raison commune, avec ce que l'on pourrait
appeler nos valeurs de civilisation. Il ne peut y avoir ici de « en même temps »
ou d'accommodement d'aucune sorte. L'idée par exemple un temps défendu par un
Tariq Ramadan d'un « moratoire » sur la lapidation comme peine pour les femmes
adultères est un pur non-sens.
On ne peut donc en aucun cas transiger avec nos valeurs fondamentales. Elles
sont pour nous, comme pour de nombreux musulmans d'ailleurs - c'est en cela
qu'elles peuvent être dites universelles -, aussi importantes que les croyances
les plus radicales ou obscurantistes pour d'autres musulmans. C'est donc à
l'islam, aux musulmans eux-mêmes, de régler, au sein de cette religion, ce
problème. Nous n'avons pas à subir les conséquences de ces divergences
d'interprétation de tel ou tel dogme.
L'idée de suspendre toute raison critique, toute considération féministe, tout
humanisme ou tout universalisme dès qu'il s'agir de l'islam ou de musulmans ne
peut que conduire au pire.
Jugez-vous que certains discours trop complaisants envers l'islam, sont en
partie responsables des menaces qui pèsent sur ceux qui osent critiquer cette
religion ?
Bien évidemment. Ils les légitiment voire les encouragent. L'idée de suspendre
toute raison critique, toute considération féministe, tout humanisme ou tout
universalisme dès qu'il s'agir de l'islam ou de musulmans ne peut que conduire
au pire. Il en va ainsi de cette manière de ne jamais reconnaître les faits,
comme ce fut encore le cas après l'attentat récent de Strasbourg. Le refus
d'admettre que c'est une idéologie, l'islamisme, construite à partir de l'islam,
d'une vision radicale de cette religion, qui est le creuset du terrorisme qui
nous frappe depuis des années participe de sa légitimation.
Le silence face aux menaces reçues aujourd'hui par Zineb El Rhazoui comme les
accusations portées hier contre Charlie Hebdo légitiment l'idéologie islamiste.
Je parlais plus haut du problème interne à l'islam, ça c'est notre problème
interne à nous, au sein de notre société démocratique, et j'ajouterais, pour
ceux qui se disent de gauche, notre problème au sein de la gauche.
On fait la guerre aux intellectuels qui osent pointer cette complaisance de la
gauche...
On ne trouve pas une telle complaisance qu'à gauche. Elle est très répandue dans
toute une partie de la société, généralement d'ailleurs dans des milieux plutôt
privilégiés qui n'ont pas l'occasion de subir au quotidien les effets de ce
qu'un sociologue comme Mohammed Cherkaoui appelle « l'islamisation de l'islam »,
c'est-à-dire le réinvestissement fondamentaliste de la religion et des pratiques
sociales ou culturelles qui en découlent. Disons que les complaisants sont en
général très exigeants sur un certain nombre de valeurs, sur la tolérance
religieuse par exemple, tant qu'elle ne les concerne pas, tant qu'elle n'a pas
d'effet sur leur propre mode de vie. Ainsi, par exemple, j'avais été frappé en
2013, au moment des manifestations contre le mariage pour tous, par la
différence entre la critique, tout à fait justifiée, à l'égard des réactions
homophobes venues du catholicisme et le silence, tout aussi injustifié lui, à
l'égard des mêmes réactions venues de l'islam. La critique de l'obscurantisme
religieux et de la bigoterie ne peut être à géométrie variable si on veut
qu'elle soit crédible et efficace.
C'est tout l'enjeu du terme « islamophobie » très souvent utilisé comme outil de
disqualification des discours anti-islamistes par tous ceux qui suspendent tout
ce à quoi ils prétendent adhérer, souvent bruyamment dans l'espace public
(droits de l'Homme, égalité entre hommes et femmes, laïcité, sécularisme, raison
critique…) dès qu'il s'agit d'islam et de musulmans.